La rencontre avait pour objectif d’établir la trame d’un plan de sauvegarde pour la filière lavande et lavandin, avec les syndicats, associations et producteurs. (ML)
Alors que la filière lavande se sent en danger depuis l’évocation d’une refonte de la réglementation Reach1, la sénatrice Marie-Pierre Monier (Drôme) et les sénateurs Jean-Yves Roux (Alpes-de-Haute-Provence) et Lucien Stanzione (Vaucluse) se saisissent à leur tour du sujet et organisent une réunion, le 29 avril 2022 à Saint-
Christol (84). Très vite, les échanges dépassent le sujet initial : la filière est en danger, en raison d’une baisse des cours du marché particulièrement marquée, et de prix désormais au dessous du coût de production. Ce n’est plus uniquement d’un appui au niveau européen que réclament producteurs, coopératives, distilleries et leurs syndicats, mais bien des mesures les plus immédiates possibles. Il faut un plan de sauvegarde.
Sur cette base, les trois représentants du Sénat passent la seconde et se retrouve à nouveau, à Revest-du-Bion (04). “Cette deuxième réunion est pensée sur l’urgence, notamment avec la question du gel qui est beaucoup revenue. En effet, l’année dernière, c’était la première fois que la filière faisait face à un aléa aussi destructeur”, confie Marie-Pierre Monier.
De cette matinée semble être née la trame du tant espéré plan de sauvegarde pour la filière lavande et lavandin. “Le moyen et le long terme, c’est bien. Mais il nous faut d’abord des solutions immédiates. Aujourd’hui, on a des exploitations qui courent à leur perte, et des agriculteurs au bord du suicide”, alerte Bertrand Granet, maire de Revest et président de la coopérative agricole Parfums Provence Ventoux.
Au départ, près d’une dizaine de propositions avaient été mises en avant, telles que l’exonération des cotisations sociales, le rééchelonnement de crédits bancaires ou encore le déclenchement des dispositifs d’activité partielle. À l’issue des échanges, le contenu du futur plan de sauvegarde s’est finalement recentré sur sept mesures, dont deux apparues lors des discussions : “L’aide à la trésorerie exceptionnelle pour les exploitations en extrême difficulté” sur le modèle de celle accordée aux arboriculteurs victimes de gel ; “rallonger l’échéance du Prêt garanti d’État” ; “aide [des] trois Départements et deux Régions” ; “indemnisation calamités agricoles, dans le cadre des pertes de fonds suite au gel des lavandes” ; “obtenir une exemption pour les
huiles essentielles dans le cadre de la révision de Reach” ; intégrer les distilleries – particulièrement affectées par la hausse des prix de l’éner-
gie – au plan de résilience ; et une aide au stockage pour les coopératives.
Dans l’assistance, certains sont sceptiques, notamment concernant les aides pour les exploitations qui subissent le gel. “Personne ne remplit les dossiers”, rage Magali Malavard,
productrice à Sault, élue de la
FDSEA et de la Chambre d’agriculture de Vaucluse. Sylvie Barjot, également productrice sur le plateau, ajoute : “Sans parler de l’oubli de la filière par FranceAgriMer au sujet des aides complémentaires”. Dans les voix des deux productrices, la colère et la déception pointent. Que faudra-t-il pour mobiliser l’administration ?
Pour le reste, tous veulent y croire et semblent prêts à appuyer ce plan. “Nous aurons besoin du soutien de tous les élus”, rappelle Lucien Stanzione. L’élu socialiste compte d’ailleurs rallier des nouveaux à la cause, à l’issue du deuxième tour des législatives ce week-end.
Si les sénateurs parviennent à aller au bout de leurs propositions, la filière sera-t-elle pour autant hors de danger ? Rien n’est certain. Raison pour laquelle les trois sénateurs portent également des dispositifs à plus long terme.
Le principal concerne l’arrachage et s’appuie sur un principe fort : “Diminuer les superficies actuelles de 15 %, soit environ 5 000 hectares”. Pour réduire les superficies – dont l’augmentation a largement contribué à une hausse de production et stocks, et donc une baisse des cours sur le marché – ils souhaitent proposer une aide de 2 000 € par hectare de lavande ou de lavandin arraché. “L’exploitation qui s’engage à arracher s’engage aussi, en contrepartie, à remplacer l’intégralité des surfaces par des superficies de céréales, des oléoprotéagineux ou des semences pendant cinq ans”, explique Jean-Yves Roux. Surtout, ne pas perdre un centimètre de terres agricoles !
Le sénateur des Alpes-de-Haute-Provence se veut toutefois rassurant : “Quand on demande un plan d’arrachage, on ne demande pas ça aux producteurs des plateaux de Sault et Valensole, ou des zones historiques de production. Nous ciblons les nouveaux bassins de production. C’est la raison pour laquelle la démarche doit être nationale”.
Pour avancer dans la bonne direction, ils estiment tous trois que le travail doit être mené avec les Parcs naturels, fins connaisseurs du territoire. “En filigrane, il faut aller vers l’Indication géographique protégée. En protégeant l’aire de production, cela nous permettrait de ne pas avoir de crise chaque année”, affirme Lucien Stanzione. Quitte à exclure des zones au sein d’un même département, il faudra donc localiser fermement les zones traditionnelles.
Parallèlement à la demande de reconnaissance de l’IGP, une candidature pour intégrer le patrimoine mondiale de l’Unesco suivra, bien qu’il faille d’abord attendre l’inscription de la baguette de pain, dont le résultat tombera à l’automne... Dans un temps plus court, une réactualisation du cahier des charges de l’AOP devrait occuper producteurs, élus et partenaires.
Alors que le gel a grillé des cultures, que la cécidomyie des lavandes ravage les plantations (les rameaux se dessèchent une fois piqués par l’insecte), que l’Europe change sa réglementation ou encore que le marché s’effondre, un refus de se laisser abattre caractérise la production provençale. “Dans la filière lavandicole, chaque fois qu’une crise nous atteint, on sait rebondir. Il y aura toujours de la lavande en Provence”, affirme Alain Aubanel, producteur dans la Drôme et président du Comité interprofessionnel des huiles essentielles françaises.
Si les aides discutées font bel et bien leur arrivée, “ça va le faire”. Le travail sur des plants plus résistants se poursuit, la recherche avance. La reconnaissance par l’Unesco, même si elle prend du temps, devrait ranimer l’âme touristique de la production. Les labels bas carbone font doucement leur entrée dans les pratiques... Non, la filière lavande et lavandin ne manque pas d’idées, ni de motivation. “Si on joue collectif, on va y arriver”, concluent les sénateurs. Les dés sont jetés, il faut désormais attendre la reprise des sessions parlementaires pour espérer aller plus loin.
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