Vaucluse 05/05/2023
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Caseneuve

Hélène Bleuzen, néo vigneronne les pieds sur terre

Elle n'est pas issue du monde agricole. Mais avec un parcours professionnel conséquent, à l'issue de ses études d'œnologie, elle a construit peu à peu un projet d'exploitation réaliste, tenant compte des réalités du changement climatique, récompensé par un prix.

Hélène Bleuzen, vigneronne Caseneuve

© Crédit photo : PN

Hélène Bleuzen ne fait pas de chichis : "Mon histoire est simple. Je ne suis pas originaire du monde agricole, j'ai grandi en région parisienne, jusqu'à mes 22 ans. Après mon bac, j'ai fait une licence en biologie à l'université, d'abord dans l'idée de faire médecine. Mais au final je me suis orienté vers des études d'œnologie, à Bordeaux." Elle obtient son diplôme national d'œnologue, en 2014, avant de s'envoler vers d'autres cieux : "J'ai quitté le Bordelais pour voir d'autres choses. Mais aussi parce que c'est un milieu un peu à part, très cloisonné, hiérarchisé, où tout le monde se scrute et s'observe : ce n'est tout simplement pas mon truc !".

De l'Afrique du Sud à Châteauneuf-du-Pape

Après une saison à Chablis, pour Boisset, qui lui permet de s'initier au négoce, aux gros volumes, elle part pour une saison en Afrique du Sud, cette fois sur une petite exploitation, avec de petites surfaces. "En rentrant, j'ai travaillé au Château Grand Boise, à Trets, dans les Bouches-du-Rhône, en face de la Montagne Sainte-Victoire." Cette expérience dans cette "jolie maison bio à taille humaine où l'on touche à tous les aspects, de la taille des vignes jusqu'à la commercialisation" commence à façonner son projet. "C'est là, dans ce paysage magnifique, que j'ai renforcé ma prise de conscience de l'importance du bio." Pourtant, la bougeotte la reprend et elle pose ses valises à Châteauneuf-du-Pape, au domaine Saint Prefert, en tant que chef de cave. Elle y restera finalement deux années. "Ça a été une expérience précieuse, très riche en apprentissage, avec beaucoup d'autonomie, et là aussi en touchant à toutes les dimensions du travail de vigneron."

Installation à Caseneuve

Une expérience professionnelle enrichissante, mais pas seulement, puisqu'elle y rencontre également son compagnon, François Busi, vigneron à Caseneuve. "Je l'ai rejoint fin 2017 après les vinifications à Châteauneuf. L'idée de créer mon propre domaine avait déjà germé dans ma tête, mais je savais qu'il fallait prendre le temps pour bien faire les choses."

Mais le hasard fait souvent bien les choses ! Il se trouve qu'il y a justement des vignes à reprendre en fermages. "Nous avions 2,50 hectares de vieux grenache qui nous tendaient les mains." Ni une, ni deux, elle les attrape au vol, en complément de 1,50 ha de syrah laissé par François. "J'ai pu atteindre un seuil suffisant pour m'installer."

Elle fait sa première vinification en 2018, dans la cave de son compagnon. Un blanc, la cuvée 'Ariane', et deux rouges, 'Le clos' et 'Le devens', l'un à 85 % en grenache, l'autre à 95 % en syrah. "Je commercialise en circuit cafés-hôtels-restaurants, chez des cavistes et un peu d'export. Je ne pense pas trop développer la vente en caveau : ça demande de la présence, ce qui est compliqué sur une petite exploitation où il faut tout faire". Et cela lui laisse du temps pour approfondir sa gamme. Ainsi, en 2020 et 2021, elle fait une cuvée en plus, 'Anaïs', un vin nature, sans soufre, sans filtration en rouge. "Mais je ne la ferais pas en 2022, car je n'aurais pas assez de récolte du fait de la sécheresse."

S'adapter à la nouvelle donne climatique

Car le changement climatique est là, et Hélène Bleuzen a conçu son domaine en tenant compte de ce paramètre. "En 2020, j'ai planté un hectare de clairette rose et de sciaccarello, l'équivalent corse du pinot, qui résiste bien à la sécheresse et ne monte pas trop en sucre, permettant de faire des vins un peu moins denses. J'aime bien ces cépages gris, roses, qui donnent de la matière et des tanins aux vins blancs. Je devrais les récolter et les vinifier pour la première fois cette année."

En parallèle, elle récupère également 20 ares de vieux ugni blanc, plantés par le grand-père de François. "Il est sur des argiles, et garde de la fraîcheur et de l'acidité." L'année dernière, elle a également acheté 10 ha hectares de terres nues, dont elle compte planter presque cinq hectares, pour pérenniser l'exploitation. "Elles sont orientées nord/nord-est, sur des sols marneux, ce qui est très intéressant par rapport aux problématiques de sécheresse. Je veux y planter du picpoul gris, cépage provençal assez tardif qui a quasiment disparu, puisqu'il n'en resterait que cinq hectares en culture aujourd'hui. Étant tardif, il a plus de chance d'échapper aux gels de printemps, et aux fortes chaleurs du début de l'été."

Un 1er prix bienvenu

"J'avais lu un article sur un jeune domaine en Côtes Rôtie, qui avait gagné la première édition du concours 'Vignerons et terroirs d'avenir', organisé par AdVini et l'Institut Agro Montpellier", explique la jeune vigneronne. Elle postulera ainsi pendant trois ans. "Mais c'est seulement cette année que mon dossier a été retenu pour faire partie de la sélection des six finalistes" : un du Roussillon, deux du Languedoc, un de Bergerac, un Loire et le Ventoux d'Hélène Bleuzen. "J'ai passé le grand oral le 21 mars, devant un jury. Il y a aussi tout un panel d'experts assez pointus, dans le domaine du climat, du marketing, de l'environnement, des finances, qui apportent leurs éclairages, leurs idées et leurs analyses, afin de peaufiner le projet. C'était intéressant d'avoir leur retour."

Bien lui en a pris, car elle est repartie avec le 1er prix du concours et surtout 50 000 euros bienvenus : ils vont lui permettre de faire les travaux d'aménagement d'une bâtisse qu'elle a déjà acheté dans le cœur du village. "C'est un très beau bâti, une maison de hameau qui était déjà consacrée au vin, dans lequel il reste d'ailleurs des cuves anciennes. Ça sera mon chai d'élevage, car on ne peut pas y mettre de grosse cuve béton, mon local de stockage et mon bureau."

De belles vignes, des cépages choisis avec soin, des compétences solides, et bientôt des murs : petit à petit, le Domaine Hélène Bleuzen prend forme. 

Pierre Nicolas, CLP •

Les CHIFFRES clés

6 hectares, bientôt 10 ha

3 vins dans la gamme

13 000 cols produits en 2021

50 000 euros remportés avec le 1er prix du concours 'Vignerons et terroirs d'avenir', organisé par AdVini et l'Institut Agro Montpellier

Céline Zambujo •

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