"Les marchés de gros de Provence se parlent, certes. Nous travaillons ensemble, mais nous avons rarement l'habitude de nous retrouver autour d'une table pour évoquer nos problématiques et notre avenir respectif", reconnaît Marcel Martel, le président du Min de Châteaurenard. Le vice-président de la Fédération des marchés de gros de France est aussi en charge des circuits courts et des productions locales pour la fédération. Et, à ce titre, il organisait à Châteaurenard une rencontre à laquelle une délégation des présidents et directeurs des six Min de la Région Sud était invitée.

Le président de la Fédération des Min de France et deux conseillers régionaux de la Région Sud participaient également à cette réunion de travail, qui s'est tenue mardi 28 juin. "Une belle initiative et une première du genre", saluée par Jean-Jacques Bolzan, président du Min de Toulouse et de la Fédération nationale des marchés de gros.

Après deux années difficiles, "nous sommes heureux d'observer une réelle dynamique sur le maillage territorial des marchés de gros. Nos marchés sont, avec les grossistes et les producteurs sur les carreaux, des acteurs économiques incontournables de la distribution alimentaire", souligne Jean-Jacques Bolzan.

Les marchés de gros de Carpentras, d'Avignon, de Cavaillon, de Châteaurenard, de Marseille et de Nice sont en effet sur la même dynamique. Une visite organisée sur le carreau de Châteaurenard, suivie de celle du chantier du pôle logistique - lancé depuis un mois - et de plusieurs rencontres d'exploitants du bassin local de production ont permis aux différents représentants des Min de s'en apercevoir.

"Nous sommes très impliqués dans l'avenir de l'alimentation, les Projets alimentaires territoriaux (PAT), la loi Égalim, les autonomies alimentaires, les circuits courts, le gaspillage... Autant de sujets qui font partie de nos problématiques communes. Nous avons donc décidé de travailler ensemble sur différents projets", rapporte Marcel Martel.

Avancer ensemble sur les circuits courts

Pour l'instant, les sujets évoqués restent vastes et nombreux. Les circuits de distribution, la distribution, la transformation, l'emprise carbone et les solutions innovantes sur la mobilité, la gestion des déchets, les circuits courts, la communication... Mais les feuilles de route ont commencé à s'écrire. Notamment grâce aux initiatives et aux bonnes pratiques déjà prises par les uns et les autres. "Les échanges du jour ont permis de nous enrichir mutuellement, pour avancer et travailler ensemble. Sur les circuits courts par exemple. Parce qu'il n'y a pas que les cabanes de vente sur le bord de route ou la vente à la ferme. Nous sommes les distributeurs de circuits courts. Tous nos Min ont des projets et s'adaptent aux nouveaux modes de commercialisation. Se rapprocher du consommateur est un objectif sur lequel nous pouvons travailler ensemble", ajoutait Marcel Martel.

Mais ce n'est pas le seul. Sur l'image des Min par exemple, le travail à engager est énorme. "Nous sommes méconnus du grand public. Notre volonté est de recevoir davantage de monde sur nos Min et d'expliquer qui l'on est et ce que l'on fait", poursuit le président du Min de Châteaurenard. Les marchés de gros s'y emploient déjà, un peu. Par le biais de différents évènements. "Mais beaucoup reste à faire, auprès des scolaires notamment", estime Jean-Jacques Bolzan, "parce que les Min sont tout un écosystème à faire connaître". Comme le résumait Frédérique Wagon, secrétaire générale des marchés de gros de France, basée à Rungis, "nos atouts sont la massification de la production agricole et agroalimentaire sur un site, mais aussi une multitude de métiers sur ce même site, qui demandent à être valorisés".

La réorganisation des flux logistiques prioritaire

Ces dernières années, c'est sur la question de la transition écologique et de la réorganisation des flux logistiques que les modèles de fonctionnement des marchés évoluent aussi dans le bons sens. Et des synergies devraient continuer d'être trouvées entre les différentes sites.

"Nous avons initié, l'an dernier, une navette de ramassage entre les Min de Carpentras et de Châteaurenard. Une initiative innovante qui a obtenu déjà des résultats probants. Nos infrastructures autoroutières ne seront pas modifiées rapidement. Il nous appartient donc de trouver des solutions de mutualisation du transport, de réduction du nombre de véhicules sur les routes, et d'économiser les productions de carbone", commente Stéphane Gori, président de l'Actium Grand Marché de Provence, qui innove déjà en la matière.

La navette mise en place l'an dernier a d'ailleurs été reconduite et multipliée cette année. "Notre ambition est de faire en sorte que l'ensemble des Min constituent des Hubs - c'est-à-dire des plateformes - qui centralisent les lieux de livraisons. Plusieurs hubs vont se déployer sur le territoire, afin que les producteurs ne livrent plus quatre ou cinq lieux dans la journée, mais un seul", ajoutait Stéphane Gori.

En matière d'environnement et d'énergie durable, les marchés de gros ont aussi revu leurs copies de leur fonctionnement. Le Min d'Avignon a lancé sa transition énergétique et de développement durable, tant sur sa production énergétique que de déchets. Son objectif est de sortir des solutions standardisées de compostage de méthanisation, en réfléchissant maintenant avec les fruits et légumes jetés sur le carreau et en cherchant, par exemple, à revaloriser ces co-produits.

Le Min de Cavaillon valorise, depuis le 1^er janvier, 100 % de ses déchets organiques en les envoyant vers une ferme d'insectes. Un bouleversement qui a permis de réduire la facture 'déchets' du Min de 30 %. Par ailleurs, 18 000 m² de panneaux solaires posés depuis quatre ans produisent aussi l'équivalent de 1 400 foyers/an. L'autoconsommation énergétique est aussi dans les cartons du redéploiement du Min de Châteaurenard.

"Il y a un réseau des Min qui se dessine. Cette première rencontre va nous permettre de travailler ensemble sur des synergies et des projets communs à l'échelle des territoires", observe Jérémie Becciu, directeur du Min de Châteaurenard. Cette tournée - qui débutait par Châteaurenard, premier marché de production de France - va en appeler d'autres dans la région. "Les Min ont tous des spécificités, mais aussi des complémentarités à valoriser et à prendre en compte pour l'organisation de notre filière", concluait Stéphane Gori.