France 25/05/2023
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Université du vin

Mieux cibler les consommateurs et les profils recherchés

La bière va-t-elle finir d'éradiquer le vin du marché des boissons alcoolisées ? Que nenni, répondent les différents intervenants présents lors des Rencontres de l'Université du vin de Suze-la-Rousse. À Avignon, la profession positive et cherche des solutions.

Partenaires de l'événement, l'interprofession des vins de la Vallée du Rhône et le Crédit Agricole Alpes Provence ne cachaient pas leur enthousiasme de la reprise de ce rendez-vous.

© Crédit photo : ML

"Avec un recul de la consommation de vin de 60 % en 40 ans, il devient urgent de trouver des solutions adaptées, car la déconsommation n'a pas la même gravité selon le type de vin et/ou le mode de consommation, ou l'âge du consommateur", alerte en préambule Michel Bernard, président de l'Université du vin de Suze-la-Rousse.

Au début du printemps, cette dernière organisait le retour de ses Rencontres, au centre de congrès du Palais des Papes d'Avignon, pour réfléchir aux fameuses solutions. "Mieux connaître les demandes des consommateurs et savoir mieux y répondre pourrait donner un nouvel élan à la filière viticole", affirme le président. La directrice de l'université, Géraldine Gossot, acquiesce.

Pour elle, qui voit tous les jours de nouvelles personnes en reconversion arriver dans la structure, il faut s'interroger sur la pertinence de continuer à inciter à devenir vigneron. "Oui, mais sous certaines conditions", répond-elle immédiatement. Une grosse capacité d'adaptation et l'intégration du marketing notamment.

La directrice affiche à l'écran différentes courbes. Sur l'une d'elles, la consommation d'alcool, de manière générale, semble avoir atteint un plafond depuis 2017, "et le principal moteur de cette baisse est la chute drastique du vin". Les spiritueux et la bière sont quant à eux restés stables, bien qu'une légère dynamique se soit réveillée depuis 2010. "Les ressorts de ce marché tiennent à trois choses : la déringardisation de la bière et la premiumisation du cœur de marché, une désalcoolisation tout à fait assumée et l'essor des microbrasseries, laissant place à des expérimentations et des profils tout à fait singuliers", énumère Géraldine Gossot.

À court terme, la dynamique est évidente : sur une année - en 2021 -, elle a pris 12 % dans la préférence des Français en matière de boissons alcoolisées, notamment chez les jeunes générations. Parallèlement, le vin rouge est particulièrement touché par la déconsommation, avec une communication restreinte, un vieillissement des consommateurs qui s'accentue, et une logique de "moins, mais mieux" qui n'arrange rien. "Nous sommes face à une ghettoïsation de la consommation du vin, en partie amortie par l'export, mais uniquement sur les vins premium. La filière doit se réinventer", affirme-t-elle haut et fort.

Société et consommation métamorphosées

Pour penser son avenir, la filière viticole doit, avant tout, mieux comprendre les évolutions de la société, dont découlent celles du marché. Dans une période où l'appétence pour le local et les produits du terroir se développe, le vin apparaît ainsi comme un produit enraciné dans ce dernier, intimement lié à différentes régions.

"Hormis le vin lui-même, c'est l'œnotourisme qui pourrait bénéficier de cet attrait pour la proximité", exprime Jérôme Fourquet, directeur du département 'Opinons et stratégies d'entreprise' à l'Institut français d'opinion publique (Ifop). La dimension patrimoniale n'est cependant pas la seule à avoir une importance dans cet aspect terroir. Au travers des circuits courts, une sensibilité environnementale est également présente ! Avec la limitation des interlocuteurs et des transports, le local prend aisément le pas sur le marché du bio.

En parallèle de ce phénomène, le Covid a renforcé le repli sur la sphère individuelle et le développement d'une "civilisation du cocon", cite l'analyste, reprenant le journaliste Vincent Cocquebert. Une société qui se tourne vers la cellule familiale et les amis proches, dans "un modèle 'Plaza' [du nom de l'agent immobilier, ndlr], extérieur-jardin-apéro-barbecue, où le vin doit trouver sa place, comme a su le faire le rosé".

Face au rythme de l'immédiateté, de la livraison à domicile, des arbitrages liés au pouvoir d'achat, des interrogations s'agglomèrent autour de la pertinence de la production de vin de garde et de la dimension 'plaisir' de la consommation de vin. "Il y a donc une vraie réflexion à avoir sur le positionnement des vins. Conforter ou viser la premiumisation pour certains, assumer le statut d'entrée de gamme pour les autres, avec un vrai questionnement pour le milieu de gamme", souligne Jérôme Fourquet.

L'adaptation, clef de voûte du futur marché

Par-dessus tout, ce sont les habitudes de consommation qui changent, particulièrement chez les jeunes. "Nous avons - dans la génération X - une rupture, avec une consommation occasionnelle, voire exceptionnelle ! Que se passera-t-il avec la génération Z ? Est-ce que nous allons passer sur une consommation exceptionnelle uniquement ?", s'interroge le sondeur. Il conseille ainsi d'aller sur trois axes : la réadaptation de la stratégie marketing ; l'export et également en entrée de gamme ; et, surtout, le renouvellement de l'offre.

"Il y a eu une chute de la consommation de rouge de dix points ces dernières années", rappelle-t-il. Il faudrait, selon lui, se lancer dans les vins frais, légers et fruités, lancer des cocktails à base de vins de type Seltzer, réfléchir à de nouvelles associations culinaires avec des légumes et des céréales... "65 % de cette génération envisagent de ne plus consommer de viande d'ici quelques années. Il me paraît incontournable que les interprofessions se saisissent du sujet".

"Nous sommes face à une ghettoïsation de la consommation du vin"

Idem pour les vins moins alcoolisés, voire sans alcool. Développement durable, format demi-bouteille, œnotourisme, exploitation de nouveaux moments de socialisation et donc, de consommation - tels que les festivals, les jeux vidéo, les afterworks... Pour simplifier le marketing de l'offre, le maintien des appellations ne doit pas bloquer l'adaptation des méthodes, comme l'a fait la bière, mais bien garder une pédagogie simple.

Florian Ceschi, directeur de Ciatti Europe - un cabinet de courtage international - fait le point sur les tendances mondiales. Il y a des points qui fonctionnent, tant dans la production du vin elle-même que dans l'organisation de la filière. "En Espagne par exemple, on trouve une grosse diversification de l'utilisation des raisins. Une importante partie est gardée en moût pour l'utilisation par l'industrie. Le pays effectue sa mue quantitative pour certains terroirs et certains produits, comme les pétillants par exemple. Un gros potentiel pour le bio est également envisageable", décrypte-t-il.

La Californie, qui représente 80 % de la production américaine, table sur la premiumisation et le renforcement de ses marques, les opérateurs défendant bec et ongles leurs linéaires. Le Chili pèse très lourd à l'export et a su verrouiller ses principaux marchés... Les exemples sont nombreux et peuvent être source de nouvelles idées. Encore faut-il accepter de les entendre, et ensuite de les envisager. 

Manon Lallemand •

IL a dit

Michel Bernard, président de l'Université du vin de Suze-la-Rousse et vigneron propriétaire du Château Beauchêne à Piolenc.

© Crédit photo : Michel Bernard

Michel Bernard, président de l'Université du vin

"Grâce à un public très varié, rencontré dans ses multiples formations professionnelles, l'Université du vin a une position d'observation privilégiée, pour entendre les attentes et suggestions des consommateurs et des producteurs. Forts de ces constats, nous avons souhaité recréer nos cycles de conférences qui ont longtemps constitué un rendez-vous incontournable de l'Université, en réunissant - sur chaque sujet - les meilleurs spécialistes et en totale indépendance de choix."

Manon Lallemand •

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