L'exploitation de la famille Vernet a bien évolué sur six générations. "En 2009, j'ai pris la décision d'arracher nos 19 hectares de vignes qui allaient pour la production de côtes-du-rhône. J'ai voulu me lancer dans la volaille", explique Vincent, 6e génération désormais aux commandes.

Mais rien n'est aussi simple que prévu : il lui faudra trois ans pour enfin obtenir les précieuses autorisations, qui lui permettent d'entamer des travaux pour cette nouvelle structure. Un parcours du combattant contre une administration lente et tatillonne, selon lui.

"Les premières volailles sont enfin arrivées en 2015, l'année où mon fils, Thomas, s'est installé. Mais, en attendant, j'ai pris quelques cochons, dès la fin du mois de mai 2011", raconte-t-il. Le début de l'aventure, puisqu'aujourd'hui, bien que les volailles soient plus nombreuses, la valorisation de la production de viande de porc permet à l'exploitation de trouver un équilibre à presque cinquante-cinquante.

Les cochons de la ferme Saint- Martin ont la belle vie, là-haut dans l'Enclave.

De l'exigence naît la qualité

"J'ai acheté mes premiers cochons pour constituer un cheptel, en 2011, et les premières ventes sont arrivées un an plus tard", se remémore Vincent Vernet. L'éleveur n'est plus naisseur, ce qui ne lui permet plus de revendiquer sa production en bio.

Le choix est parfaitement assumé : "Pour avoir un élevage en bio, il faut faire naître, et c'est une logistique difficile. Quand on en avait 15 ou 16 qui naissaient et, qu'au final, il n'en restait que six parce qu'ils se faisaient écraser, c'était décourageant. Sans compter l'alimentation plus chère. Au final, quand il ne reste plus que 5 000 euros, on a compris que ça ne pouvait pas tenir".

Pas bio donc, mais avec un impératif de qualité jamais négligé. Vincent Vernet et son fils Thomas, ont ainsi décidé d'intégrer le Syndicat de défense et de promotion du cochon du Mont Ventoux plein air, en 2020. "Depuis que l'aire géographique s'est un peu élargie, nous avons pu répondre au cahier des charges", informe l'agriculteur.

Les porcelets qu'il récupère lorsqu'ils atteignent environ 25 kg, vivent ensuite quatre semaines en intérieur, le temps de s'endurcir, puis profitent ensuite de la vie en extérieur. Et quelle vie ! 110 m² par animal et pas plus de 90 par hectare, cinq parcours différents dans un roulement continuel, la vie en plein vent sur un plateau surplombant Grillon... "C'est aussi une race particulière que l'on ne trouve pas partout. Faire partie de ce label nous permet aussi un encadrement spécifique", précise Victoria, la fille de Vincent.

Le regard fier sur ses bêtes qu'il aime voir gambader en plein air, il ne voit que des avantages, malgré les difficultés qu'amène nécessairement l'activité d'élevage : "Nos cochons sont issus d'un croisement que personne ne veut faire. Les Duroc sont particuliers : c'est une race qui grossit moins vite, mais ils ne font pas trop de lard, ce qui est intéressant pour une bonne qualité". Ils ont aussi un meilleur pH, un avantage notable, mais qui demande une veille régulière, beaucoup de paramètres intervenant sur ce point, tels que le stress, le fait d'être à jeun à l'abattage, la vitesse de refroidissement de la viande etc.

"En plus d'être des bêtes curieuses dont on peut valoriser la viande, ils me permettent aussi d'amorcer une meilleure rotation des terres et de récupérer du purin pour les cultures végétales", relativise l'éleveur.

À ce jour, l'exploitation commercialise sa production en vente directe, en colis. L'abattage et la découpe sont réalisés par les abattoirs du pays d'Apt, à Saint-Saturnin-les-Apt, une fois que les cochons atteignent les 140 à 153 kg, pour un poids carcasse de 95 à 115 kg.

Aller plus loin, toujours en famille

Aujourd'hui, la septième génération est donc également présente avec ses enfants, Thomas, déjà installé, et Victoria, qui a achevé un master en marketing et stratégie d'entreprise, et qui s'interroge sur sa place dans l'exploitation familiale. La jeune femme n'a pas fait d'études agricoles, donc elle ne peut s'installer en tant qu'exploitante. Mais elle compte bien jouer un rôle dans l'entreprise familiale, notamment dans l'accentuation de la vente directe.

"Nous aimerions mettre aux normes les laboratoires que nous avons déjà grâce à l'élevage de volailles. Nous avons la structure nécessaire, mais il faut l'adapter pour les porcs. Ça prend son temps et requiert une réglementation particulière, du travail, et évidemment des coût", dévoile Victoria. À l'avenir, la famille aimerait effectivement reprendre le pas pour certains produits, notamment les saucissons.

La jeune femme pousse également la vente directe et accentue la promotion, via les réseaux sociaux avec Facebook. Alors que les beaux jours et la saison des barbecues reviennent, des colis grillades et charcuterie (saucissons, chorizos séchés, jambon cru, ou encore terrine de campagne, aux olives et autres) de 2,5 à 5 kg refont, par exemple, leur apparition. La réservation est d'ailleurs actuellement ouverte jusqu'au 30 avril. La famille Vernet est également régulièrement présente sur les marchés.

La ferme Saint-Martin poursuit donc son histoire familiale, à l'équilibre entre volailles et cochons, et l'aventure est loin d'être terminée ! 

2 exploitants (Vincent et Thomas) et 1 salarié

30 hectares de terres

18 hectares de parcours divisés en 5 parcs

Entre 400 et 450 cochons

28 000 volailles dans 4 bâtiments

4 hectares de tomates bio pour la conserve

1 à 2 hectares de cultures diverses