Vaucluse 23/12/2022
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FDSEA 84

L'impression d'être "le dindon de la farce"

Une dernière manifestation avant les fêtes de fin d'année, il fallait bien cela pour souligner la détresse du monde agricole. Avec une crise énergétique qui vient se superposer aux (déjà) trop nombreuses difficultés, la colère domine. Vendredi 16 décembre, les adhérents de la FDSEA de Vaucluse ont donc pris le chemin de la préfecture, où ils n'ont finalement pas été reçus.

Pommes et paille de lavande fumante ont été déversées sur le trottoir devant la préfecture. Au final, personne des services de l'État n'aura reçu les agriculteurs, en colère et déboussolés.

© Crédit photo : FDSEA 84

Alors que la crise des énergies fait rage pour tous les secteurs, elle vient tout particulièrement cristalliser les nombreux problèmes déjà endossés par le milieu agricole. "Ce qui est en train de se passer plonge les agriculteurs dans l'incertitude des remises en culture. Pour certains, on n'a jamais été aussi près de la cessation d'activité", rapporte Sophie Vache, présidente de la Fédération départementale des syndicats d'exploitants agricoles de Vaucluse (FDSEA 84). Face à l'inquiétude grandissante provoquée par la situation globale, le syndicat organisait, vendredi dernier, une manifestation pour interpeller à nouveau la préfète de Vaucluse, Violaine Demaret, après la dernière alerte du 25 novembre1.

Au départ de la Chambre d'agriculture, une trentaine d'agriculteurs, drapeaux à la main, sont tous les sens en alerte : que faudra-t-il de plus pour que la conscience s'éveille ? "Une exploitation qui s'arrête, elle s'arrête", souligne Bertrand Mille, secrétaire général de la fédération.

À ce moment, ils sont encore à des années-lumière de penser que la discussion n'aura même pas lieu.

Faire passer les dossiers du présent en priorité

Ces dernières années et leur succession de crises a, bien évidemment, obligé l'État à réagir. Plans de sauvegarde, de relance, aides... "Le problème, c'est que ce ne sont pas toujours les réponses les plus adaptées à l'agriculture. Nos entreprises sont particulières et travaillent avec le vivant. Les agriculteurs n'en peuvent plus, la filière bio est en grande difficulté. Par-dessus tout, la société idéalise une agriculture qui n'existe pas. Nous sommes coincés entre les deux, et l'équation reste sans solution", développe la présidente de la FDSEA. L'agricultrice fait spécifiquement référence à cette souveraineté alimentaire dont l'étendard est si souvent brandi, mais que les faits accompagnent trop peu : "Il faut se rendre à l'évidence, chaque année on perd en souveraineté, quand va-t-on en prendre conscience ?".

En priorité, le syndicat réclame un paiement des dossiers en cours. Depuis le Covid, des dizaines restent encore impayées. "Quand on admet qu'il y a urgence, il faut payer avec urgence ! Les agriculteurs sont abattus et n'en voient pas la fin. Peut-être faudrait-il arrêter de faire miroiter le futur avec des plans de relance et des France 2030 alors que, dans les faits, nous ne sommes mêmes pas capables de régler les problèmes qui sont dans le présent", expose Sophie Vache. Pour appuyer ses dires, elle a pu compter sur la présence d'André Bernard, président de la Chambre régionale d'agriculture, mais présent avant tout en tant qu'exploitant vauclusien : "J'ai de multiples casquettes, mais je suis d'abord présent en tant qu'agriculteur très inquiet de la situation globale. Tout évolue et change très vite d'un point de vue réglementaire". Il fait notamment référence à la crise énergétique où chaque jour revient à un nouveau saut dans l'inconnu. "Il y a un ras-le-bol de l'administratif qui s'est accentué. Pendant le Covid, l'État a soutenu tous les domaines d'activité quand nous nous sommes démenés pour produire et continuer à nourrir la France. Maintenant, c'est à eux de nous aider", poursuit-il.

2023 s'annonce d'ores et déjà compliquée en termes de production, avec des prévisions revues à la baisse, même sur des cultures qu'il estime simplifiées, comme le tournesol ou le pois chiche. "2022 n'a été que sécheresse et, depuis octobre, nous sommes constamment inondés. Nous n'arrivons même pas à planter", explique l'agriculteur.

Le syndicat espère également la mise en place d'une cellule de crise pour centraliser les questionnements autour des énergies et venir décortiquer les dispositifs, souvent complexes et mal appréhendés par les agriculteurs.

Quel dialogue avec l'État ?

Pour aller jusqu'à la préfecture, ils sont donc une grosse trentaine à se retrouver à la Chambre d'agriculture. Pour certains, c'est trop peu : "Nos anciens et leurs fourches, s'ils voyaient ça... Ce n'est pas comme ça qu'on va avancer ! Il y a un mois on était déjà au même point, et en même temps, la préfète n'est arrivée qu'il y a quelques mois. Elle ne peut pas tout solutionner en un coup de baguette magique".

Partis pour exprimer l'inquiétude, le mal-être lié à l'absence de visibilité ou bien encore leurs interrogations quant à la capacité d'adaptation, les agriculteurs de la FDSEA estimaient se sentir "perdus face à la notion de souveraineté alimentaire qui ne veut plus rien dire au final, puisque nous ne pouvons vivre décemment de nos produits". Parmi les revendications figure également une volonté de dire stop. "Stop aux réglementations inapplicables, aux dossiers de 100 pages, à la dématérialisation inintelligente... Stop à la surenchère réglementaire franco-française... Stop au verdissement à tout prix... Stop aux interdictions sans solutions...", énumère le communiqué de presse de la fédération.

"Le syndicalisme doit montrer les difficultés de l'agriculture, montrer comment ça va se passer si on continue à charger les agriculteurs", insistait la présidente de la fédération, avant le départ pour le boulevard Limbert. Mais une fois sur place, c'est la douche froide : alors que tous pensaient être reçus par le directeur de cabinet de la préfecture, Vincent Naturel, et la préfète Violaine Demaret elle-même, pour une première réelle entrée en discussion avec les services de l'État, les agriculteurs sont restés sur le parvis.

"À l'approche des fêtes, on a vraiment l'impression d'être le dindon de la farce", déplore Sophie Vache. Pour le syndicat, c'est le double discours qui dérange, entre annonces du gouvernement, ministre à l'écoute lors du congrès Légumes de France2, et ce raté avec les services de l'État. La confiance s'effrite.

"En France aujourd'hui, on a une sur-réglementation qui est impossible pour nous, agriculteurs, à tenir. Avec cette sur-réglementation, on n'aura pas la possibilité de vous faire manger, vous les Français, l'année prochaine s'il n'y a pas de déblocage rapide de l'État", interpelle Bertrand Mille dans une vidéo présentée sur les réseaux sociaux à l'issue de la manifestation.

La messe est dite : 2023 s'annonce compliquée en tous points de vue. 

Manon Lallemand •

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