Europe 28/10/2022
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enjeux de l'agricultureeuropéenne

Des politiques incitatives et des moyens pour changer de modèle

Pour sortir de la spirale dans laquelle le secteur agricole est engagé, quatre députés européens étaient invités à partager leur vision et proposer leurs pistes, à l'occasion du salon Med'Agri.

Le salon Med'Agri a invité quatre députés qui siègent, entre autres, à la Commission agricole du Parlement, dans le cadre d'une visioconférence sur le thème des enjeux de l'agriculture européenne.

© Crédit photo : ED

Les enjeux auxquels l'agriculture européenne est confrontée sont un vaste sujet. L'année 2022, totalement atypique, s'achève dans un contexte totalement incertain, et presque tous les clignotants agricoles sont au rouge. Il y a encore peu de temps, on pensait que la surabondance alimentaire était acquise, que le futur de notre agriculture allait vers le moins de production et plus de qualité. Mais plusieurs éléments sont venus jouer les troubles fêtes. La guerre en Ukraine, grenier à blé et à maïs de l'Europe, a fait exploser les cours des céréales et des engrais azotés notamment, mais aussi quadrupler le prix de l'énergie dont beaucoup de productions agricoles dépendent.

L'Europe a dû aussi réagir vite et permettre la remise en culture de jachères, une entorse à la Politique agricole commune mais qui, finalement, a permis de passer un peu mieux cette crise.

Un malheur ne venant pas seul, l'été a aussi été marqué par des températures extrêmes et des records de déficits pluviométriques, sans oublier les épisodes de gel tardifs et de grêle, qui ont perturbé beaucoup de productions sur de nombreux territoires.

Par ailleurs, le changement climatique en marche s'est, semble-t-il, accéléré et remet totalement en cause aujourd'hui nos modes de culture et d'utilisation de l'eau.

Face à ces situations préoccupantes, l'Europe se doit de rester unie et de réagir pour limiter au plus les effets de cette crise. Le salon Med'Agri donnait, il y a quelques jours, la parole à quatre députés européens, fins connaisseurs des questions agricoles et de la ruralité, et ils étaient invités à partager leurs pistes.

Plus de simplification, moins de règlementations

Anne Sander (élue Les Républicains) préconise moins de contraintes dans l'application de la législation européenne. Dans le cadre de cette rencontre en duplex avec le Parlement européen de Strasbourg, la députée expliquait qu'elle travaille depuis quelques années, avec d'autres, sur les effets et sur la manière de prévenir plus encore le changement climatique. Si elle salue aujourd'hui une certaine prise de conscience dans le débat, "puisque nous parlons aujourd'hui à nouveau d'agriculture, d'alimentation et de la sécurité alimentaire, dans les faits, il y a un décalage total, en partie avec la Commission européenne. Bruxelles propose en permanence de nouvelles législations qui, certes, doivent être ambitieuses, mais qui manquent de réalisme avec les situations vécues dans les États membres. Comme, par exemple, la législation sur l'interdiction totale des produits phytosanitaires dans de nombreuses zones protégées".

Pour la députée du Bas-Rhin, afin de produire mieux et davantage, "le 'paquet' doit être mis sur l'accompagnement du monde agricole. Nous avons aussi besoin d'un financement plus important pour accompagner les agriculteurs et les entreprises dans les transitions. Il est également essentiel de valoriser ce que les agriculteurs font pour lutter contre le changement climatique, avec des politiques favorisant la méthanisation ou le photovoltaïque par exemple".

Mais c'est surtout la fin aux sur-réglementations punitives pour le monde agricole qu'Anne Sander appelle de tous ses vœux. "Soyons ambitieux, mais surtout pragmatiques, en aidant le secteur à valoriser ces démarches vertueuses."

Avec un pied dans la viticulture dans l'Hérault, Irène Tolleret (élue La République en Marche) souhaitait aborder, quant à elle, la gestion des risques sanitaires et climatiques.

Les instruments de gestion des risques climatiques ont une place très restreinte dans la législation européenne. "La Pac peut en revanche agir sur les mesures préventives, pour accroître la résilience de l'agriculture européenne, en soutenant des pratiques plus respectueuses, les ressources naturelles et les investissements", d'après la députée.

Aujourd'hui, les régimes d'assurances sont confrontés au défi majeur du changement climatique puisque les catastrophes sont annuelles. Et la prochaine réforme - qui entrera en France en vigueur l'année prochaine - doit tenter de mieux répondre aux besoins, en offrant une couverture plus large pour les pertes résultantes d'évènements climatiques. "Mais le calcul des pertes en France est actuellement basé sur le calcul d'une moyenne que l'on appelle 'olympique'. Or, cette dernière affaiblit le système, car elle est basée sur les cinq dernières années, en enlevant les années présentant la valeur la plus élevée et la plus faible. Lors de la prochaine réforme de la Pac, la modification de cette moyenne devrait être l'une des priorités politiques de la France et de l'Europe. Il nous faut pouvoir combiner les politiques de prévention des risques avec des systèmes d'assurance beaucoup plus efficaces", observe Irène Tolleret.

Définir d'abord les objectifs

Depuis des années, Éric Andrieu (élu PS) plaide, lui, en faveur d'une réforme en profondeur et radicale de la Pac, estimant que le marché seul n'est pas en mesure de régler les risques géopolitiques et climatiques. "C'est une erreur d'avoir confié, dans les années 1980-1990, l'agriculture aux marchés structurellement instables. L'agriculture est un secteur qui a au contraire besoin de régulation." Pour le député de Narbonne, le sujet est majeur, car "l'enjeu est de reconstruire la souveraineté et la sécurité alimentaires au niveau européen, par une planification alimentaire et écologique de l'agriculture. Or, nous continuons de définir les moyens avant les objectifs. Nous avons, en 2018, fini par définir le budget au niveau européen et ensuite des grands objectifs de biodiversité. Depuis, on essaye de redonner du sens, du contenu à cette réforme", observait-il.

Si l'on veut donner du sens à l'agriculture européenne, il faudrait donc "reconnaître les questions agricoles et alimentaires comme un enjeu géopolitique". Et, pour changer de modèle, il faut des moyens. "Mais l'on demande aujourd'hui aux agriculteurs de faire mieux, de faire plus, avec moins d'argent", déplore le député au Parlement de Strasbourg.

Très au fait des questions liées à la gestion de l'eau Benoit Biteau (élu EELV), agronome et paysan, soulignait aussi que les épisodes climatiques et géopolitiques majeurs que nous venons de vivre sont des indicateurs forts de notre vulnérabilité, par rapport aux logiques européennes en matière de sécurité alimentaire. "On a tout misé sur l'économie de marché, fait disparaître des stocks stratégiques qui appartiennent désormais à des entreprises privées, et favorisé les logiques spéculatives. Ce n'est pas par davantage de règlementations que l'on avancera. Il faut plutôt construire des politiques incitatives et d'encouragement, de manière à accompagner cette transition", commentait-il.

Pour le député, l'enveloppe européenne n'a pas été suffisamment dimensionnée, et la nouvelle Pac manque d'ambition "pour que les politiques encouragent les changements de pratiques, de logique commerciale, afin que l'agriculture soit vraiment orientée vers la sécurité alimentaire".

Se projeter à moyen et long terme, trouver des réponses qui anticipent des phénomènes comme le changement climatique, ou l'effondrement de la biodiversité, font partie du rôle des élus. Mais, pour être au rendez-vous de l'histoire, les politiques publiques à construire sur fond de changement climatique ont décidément encore beaucoup à faire pour véritablement amorcer un nouveau cercle vertueux. 

Emmanuel Delarue •

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